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Décret tertiaire : présentation et fonctionnement

Par Philippe , le 8 septembre 2022 - 9 minutes de lecture
Decret tertiaire

En France, le secteur du bâtiment consomme beaucoup d’énergie et émet une importante quantité de gaz à effet de serre. Pour faire face à cette situation, l’État a mis en place un décret visant à atteindre un objectif d’efficacité et de sobriété énergétique dans l’immobilier. Mis en place à partir de 2010 et rendu officiel en 2019, le décret tertiaire énonce les modalités d’application de l’article 175 de la loi ELAN et régit l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments. Cette réglementation vise à régulariser la consommation énergétique des maisons tertiaires existantes et contient certains détails de mise en œuvre.

Historique du décret tertiaire

En 2010, la loi Grenelle II porte sur l’engagement national pour l’environnement et instaure un dispositif visant la rénovation du parc des bâtiments tertiaires. En 2018, le texte a été remanié lors de la publication de la loi ELAN. Cette dernière régit l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique.

Le décret tertiaire est finalement entré en vigueur le 1er octobre 2019. Cette loi impose aux propriétaires et exploitants d’établissements abritant des activités tertiaires, un suivi et une diminution de leurs consommations énergétiques.

Le décret tertiaire : qu’est-ce que c’est ?

Appelé également « dispositif Eco Energie Tertiaire », le décret tertiaire est une obligation réglementaire visant à solliciter les acteurs du tertiaire à respecter la sobriété énergétique. Il cible la réduction de la consommation du parc tertiaire pour les 30 prochaines années.

Les types de bâtiments concernés par le décret tertiaire

Tous les bâtiments à usage tertiaire, public ou privé, existants à la date de publication de la loi ELAN, soit le 24 novembre 2018, et dont la surface de plancher est supérieure ou égale à 1 000 m2 sont concernés.

Le décret touche également l’ensemble de bien immobilier situé sur une même unité foncière, même si elle est à usage mixte. Il peut s’agir de :

  • Bureaux,
  • Local d’administrations
  • Établissements logistiques
  • Édifices d’enseignement
  • Cafés, Hôtels et Restaurants
  • Et tous les ERP.

Le décret tertiaire implique les différentes parties prenantes telles que les propriétaires et les locataires. En raison de la disposition contractuelle régissant leurs relations respectives, ces entités sont responsables des besoins énergétiques d’un bâtiment. Il est possible de mutualiser l’obligation de réduction des consommations de plusieurs bâtiments à l‘échelle nationale et à différents niveaux régionaux (régional ou départemental).

Le décret tertiaire ne touche pas les bâtiments suivants :

  • les bâtiments ou parties de bâtiments destinés au culte,
  • les locaux à usage opérationnel de défense, de sécurité civile ou de sûreté intérieure du territoire,
  • et les constructions ayant fait l’objet d’un permis de construire à titre précaire.

Pour se conformer aux objectifs du décret tertiaire, les professionnels doivent se doter d’outils capables d’ajuster l’état de leurs consommations énergétiques.

Les objectifs du décret tertiaire

Le décret tertiaire vise à réduire la consommation finale d’énergie (tous usages confondus). Ces objectifs peuvent être atteints grâce à des modalités de quantification différentes.

Réduction des consommations énergétiques en valeur relative

Le nouveau décret tertiaire fixe les échéances d’économies d’énergie par rapport à une année de référence, soit à partir de 2010. Les bâtiments soumis à cette loi ont l’obligation de réduire leurs consommations d’énergie de 40 % d’ici 2030, de 50 % en 2040 et de 60 % en 2050. Dans ce cas, les assujettis choisissent leur consommation énergétique de référence.

Réduction des consommations énergétiques en valeur absolue

La deuxième méthode exprime le niveau de performance minimum à atteindre en valeur absolue. Pour chaque type de bâtiment et chaque catégorie d’activité associée, le décret tertiaire décrit le seuil de consommation finale en kWh/m2/an. La limite est fixée en fonction de la consommation énergétique correspondant au type de bâtiments.

La valeur de la réduction de consommation dépend de deux facteurs :

  • le CVC (chauffage, ventilation et climatisation)
  • et l’USE (usage de bâtiment)

L’objectif exprimé en valeur absolue s’adapte mieux aux assujettis ayant déjà commencé la réduction de consommation d’énergie. Quant aux propriétaires ayant un niveau de consommation d’énergie important, ils doivent se diriger vers l’objectif en valeur relative et choisir l’année de référence.

Possibilité de moduler les objectifs

Pour faciliter la mise en œuvre du décret, le législateur offre aux propriétaires un cadre plus souple : la possibilité de moduler les objectifs en fonction de certains critères. Il s’agit :

  • de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales relatives aux bâtiments concernés ;
  • du changement du type et du volume d’activité exercée dans ces bâtiments ;
  • et des coûts de la mise en œuvre des actions par rapport aux avantages attendus en termes de consommation d’énergie finale.

Afin de profiter de ces modulations, le propriétaire ou le bailleur compose un dossier technique établi par une personne qualifiée. Le document nécessaire à ces modulations est élaboré en fonction de leurs responsabilités respectives.

Les actions mises en œuvre pour baisser la consommation énergétique

Pour baisser sa consommation énergétique, un propriétaire a le choix entre de différentes actions. Vous pouvez réaliser de travaux tels qu’une protection solaire, une isolation ou de la menuiserie et améliorer la performance énergétique du bâtiment. L’installation des équipements performants comme le chauffage ou l’éclairage vous permet de respecter ces obligations. Quant à la mise en place des dispositifs de contrôle de ces appareils, elle vous aide à atteindre l’objectif du décret tertiaire.

Pour un bâtiment en location, le propriétaire peut inclure un suivi attentif et une gestion active des matériels avec un objectif de résultat dans le contrat d’exploitation. Cela optimise les modalités d’exploitation des équipements. L’adaptation des locaux à une économie d’énergie et l’incitation des occupants à un comportement écoresponsable améliorent la consommation. La coordination de ces actions et leur suivi périodique peuvent être facilités par le déploiement d’une plateforme de management de l’énergie.

Les démarches à effectuer dans le cadre du décret tertiaire

Saisie des données sur la plateforme OPERAT

Pour chaque bâtiment soumis à cette obligation énergétique, le propriétaire ou les locataires doivent saisir les données relatives à son patrimoine avant le 30 septembre 2022. Ils sont tenus de choisir une année de référence comprise entre 2010 et 2019. La responsabilité d’enregistrer ces informations dans l’Observatoire de la Performance énergétique de la Rénovation et des Actions Tertiaire (OPERAT), une institution administrée par l’Ademe incombe l’occupant.

La consommation de référence est exprimée en énergie finale, mesurée aux compteurs (de gaz, d’électricité, etc.) sur une année complète d’exploitation (12 mois consécutifs). Toutes les consommations sont concernées, à l’exception des bornes de recharges des véhicules électriques. Seules les factures émises par les fournisseurs d’énergie et les données de consommation provenant des distributeurs d’énergie sont prises en compte.

Mise en place d’un plan d’économie d’énergie

Le propriétaire ou locataire met en place un plan d’économie d’énergie et indique les consommations réelles année après année. La consommation de l’année en cours doit être renseignée au plus tard le 30 septembre de l’année suivant. Il appartient à chaque collectivité de mettre en place les actions nécessaires afin de répondre aux obligations légales et ne pas risquer de sanctions financières.

La plateforme OPERAT pour déclarer et suivre les consommations d’énergie

Pour faciliter l’application du décret tertiaire, une plateforme numérique éditée par l’Ademe a été mise en place : l’OPERAT. Elle recense les données de consommation des assujettis en fonction des variations climatiques. Les propriétaires transmettent les informations suivantes :

  • Activités tertiaires exercées,
  • surface du bâtiment,
  • consommations annuelles par type d’énergie,
  • année de référence, consommations associées et justificatives correspondantes,
  • indicateurs d’intensité d’usage relatifs aux activités hébergées,
  • modulations prévues,
  • et comptabilisation des consommations d’énergie finale liés à la recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables.

Généralement à la charge des propriétaires, la déclaration annuelle des consommations d’énergie peut être déléguée à un prestataire privé ou un gestionnaire des réseaux. La date limite de la première déclaration est fixée au 30 septembre 2022. Les responsables y font figurer les données de consommations énergétiques annuelles de 2020, les consommations annuelles 2021 ainsi que les données de référence choisie.

Suite à la transmission de ces informations, la plateforme OPERAT délivre une attestation annuelle munie d’une notation « Eco Energie Tertiaire » à l’entreprise déclarante. La certification va d’un niveau de consommation énergétique annuelle insatisfait (feuille grise) à un niveau excellent (3 feuilles vertes).

Les sanctions administratives prévues

Les sanctions dépendent de l’obligation non respectée. En cas de non-respect de reporting, aucune sanction pécuniaire ne sera appliquée.

Si le propriétaire ou le preneur de bail ne transmet pas les données de consommations à partir de la plateforme OPERAT, il s’expose à une mise en demeure et à une obligation de les transmettre dans un délai de 3 mois. À défaut, le document retraçant les mises en demeure sans effet fera l’objet d’une publication sur un site internet des services de l’État. Il s’agit du principe de « name & shame».

En cas d’obligations non respectées, le propriétaire paie une amende administrative de 1 500 euros pour une personne physique et de 7 500 euros pour une personne morale.

Philippe

Entrepreneur dans l'âme, Philippe accompagne depuis 20 ans les entreprises dans leur développement.